30.11.07

Archive 2003

Séjour en clinique neuropsychiatrique

24/01/03
Arrivée. Deux heures d'attente pour enfin voir la chambre. Quelle importance ? Je vais essayer d'écrire une sorte de journal. En effet, je suis curieux de voir les conséquences des médicaments sur mes pensées, ainsi que de pouvoir garder une trace d'une éventuelle évolution. Quand je dis médicaments, c'est qu'une partie d'entre eux sont administrés par perfusion car avant j'en prenais par voie orale, plusieurs différents, à doses différentes, mais ça ne m'a rien fait. Je me demande comment des médicaments peuvent lutter contre des pensées. Peut-être que ce séjour me montera comment ça se passe et surtout si c'est possible.
La première chose qui me vient à l'esprit, c'est que le fait de côtoyer d'autres "malades" n'aide sûrement pas à avoir envie de vivre... Il faudra que les médicaments soient puissants, oui puissants...

25/01/03
Pas de traitement. C'est la conséquence de mon entretien avec mon psy hier soir. Ça m'a fait un peu bizarre, moi qui était venu ici pratiquement uniquement pour essayer les "supers médicaments" d'une clinique. Mais c'est le fruit d'une co-réflexion pertinente. Quels sont les pouvoirs des médicaments ? Détendre, calmer, stimuler. Les 4 mois auxquels j'ai été soumis auraient du me stimuler, je prenais ce qu'il y a de mieux. Mais ça n'a pas marché, il se trouve que toute la stimulation artificielle (au sens de provoquée) a été complètement "désactivée", sans effet, à cause de mon esprit. Celui-ci a simplement utilisé ce qu'il avait à se disposition, c'est-à-dire plusieurs conclusions qui sont les fruits d'associations de constats, d'expériences, d'analyses et de raisonnements.
Les médicaments ont été impuissant à convaincre mon esprit devant la force des conclusions dont il dispose. Et ils le seront encore. Ils ne peuvent m'être d'aucun secours car ils ne peuvent répondre à aucun de mes besoins. Il n'est d'ailleurs pas chose facile de déterminer de quoi j'ai besoin, sans quoi le problème ne serait pas si complexe.

Et maintenant ? Le but de mon séjour en ce lieu relativement austère, quel est-il ? A quoi cela me sert de rester ici ? Certes, je vais voir un psy, plusieurs fois par semaine je suppose, contre une seule fois à l'extérieur. Voilà sans doute la principale chose qui me retient ici. Je crois que j'en vois une ou deux autres, moindre.
Le fait d'avoir essayé. Si je sors après quelques jours seulement, certaines personnes ne manqueront pas de considérer que "je n'ai pas fait l'essai de la clinique". Ce que je trouve important, c'est d'essayer le suivi psychologique multi-hebdomadaire, et non la clinique pour la clinique.
Il me semble aussi avoir entendu que d'être comme cela en clinique, ça permettait de réfléchir sur soi, de faire le point et tout. Cette facette me fait rire, moi qui passe mon temps à faire cela où que je sois. Cependant, appelons ça le test ultime. Là je vais n'avoir vraiment que ça à faire, il y a des chances que je noircisse pas mal de feuilles.
Je pense que sur certaines personnes, être entouré de patients plus ou moins atteints et relativement malheureux peut avoir un effet positif. Je veux dire qu'il est possible que l'estime de soi de la personne remonte, qu'elle se dise que finalement elle a plutôt de la chance par rapport aux autres. Ça peut être un élément positif en vue d'une dynamique de remise à flots et de sortie de la clinique. Cependant, j'échappe à ce bon point, pour deux raisons. L'une c'est que je ne crois pas avoir un déficit d'estime de moi-même, moi qui trouve les gens bêtes, je ne sais si on peut considérer que je me considère comme supérieur aux autres - certains ne se gênent pas pour le dire -, peut-être que quelque part oui. Bref, probablement inutile de remonter l'estime que j'ai de moi. Et l'autre, c'est que même si c'était le cas, je ne serais pratiquement pas touché par le phénomène de relativisation, comme expliqué dans mon "livre".

29/01/03
Avec le recul, je vais pouvoir mieux analyser ma permission d'hier. Je savais déjà que le net était important pour moi mais je m'en suis encore plus rendu compte au cours de ces derniers jours. Hier j'en ai profité pendant 3 heures et c'était comme une bouffée d'air pur. J'entends parfois que rester sur le net c'est s'isoler, en fait pour moi c'est l'inverse. Le net est une véritable ouverture sur le monde. Envoyer des mails c'est communiquer avec des personnes, surfer sur des sites c'est regarder les informations présentées par d'autres, on jour en ligne avec d'autres personnes, on communique en direct avec des personnes...etc. Quand je suis sur le net, je participe à un partage d'informations avec d'autres, je suis ouvert au monde et aux gens. Je ne m'en rendais pas réellement compte quand j'y étais très souvent mais j'ai vu la différence ici à la clinique. Je n'échange rien ici ou presque. Je n'ai pas une gigantesque porte ouverte sur le monde et les gens. Ça m'assèche complètement, je suis privé d'un besoin. Il y a des chances que je vienne de mettre le doigt sur un point important.

Après ces trois heures de net chez moi, je suis allé donner des cours d'échecs à des enfants d'une dizaine d'années, pendant deux heures. Là aussi, ça a agi comme une bouffée d'air pur. Rien de plus pur que le regard d'un enfant, où on peut lire à la fois insouciance, joie de vivre, émerveillement et soif de connaissance. Surtout autour du jeu auquel je dois tant.

De retour à la clinique, je me suis posé quelques questions. Faut-il être sevré des choses auxquelles ont est habitué pour se rendre compte de leur valeur ? Il y a des chances. Mais que se passe-t-il lorsqu'on retombe dans la routine dans laquelle on était ? J'aurais tendance à dire qu'au bout de quelques jours, l'habitude va revenir puis la lassitude. Il n'est décidément pas toujours évident d'analyser les situations. Je sais aussi qu'un rythme normal comprend une bonne partie de boulot dans la journée. Est-ce que ça formerait un équilibre qui me conviendrait ? Peut-être. Reste qu'il y aura toujours des gens partout... Scepticisme et lueur d'espoir se confondent dans ma tête.

30/01/03
Il peut paraître intéressant d'exploiter le fait que j'ai besoin d'une ouverture sur le monde et sur les gens pour changer le moyen que j'utilise pour combler ce besoin. Je veux bien croire que d'avoir un dialogue avec une ou plusieurs personnes est quelque chose qui s'apprend, mais la difficulté ne se situe pas qu'à ce niveau-là. Le moyen utilisé pour communique influe sur le contenu des conversations. En trois années de discussions en direct sur le net, j'ai pu m'en rendre compte. Je vois deux principales explications. Déjà, chacun est chez soi, ne pas être en face de son interlocuteur a une forte influence sur les propos qu'on va lui tenir. Je dirais d'ailleurs que ça élargit le champ des possibilités. Via le net on peut presque tout dire, tout aborder. Il est évident que l'on peut y avoir des discussions que l'on aurait jamais eu de vive voix. La deuxième chose, c'est que l'on a le temps de réfléchir à ce que l'on va dire, avant de le taper. Cela engendre que la plupart des conversations et échanges en direct online sont plus réfléchis et plus profonds que ceux à l'oral. C'est d'ailleurs pour cela que j'apprécie tant les premières pendant que j'ai peu d'affinités avec les secondes. Je trouve bien peu d'intérêt à la dimension sensorielle d'un dialogue face à face. Je lui préfère de loin l'intimité et la réflexion de ceux qui passent par Internet.

Pour prendre quelques exemples, sur le net, ceux qui utilisent habituellement le ton de leur voix, le volume sonore, gestes ou autres mimiques n'ont plus ces avantages. On peut pleurer d'émotion sans avoir honte vis à vis de l'autre, lui avouer ou non. Les sentiments doivent passer par les mots s'ils veulent passer, je trouve ça bien. Une personne timide peut s'exprimer et même y rayonner tandis qu'une personne extravertie voire exubérante n'y dominera plus les échanges à coup sûr. L'importance est mise sur le sens des mots et non plus sur la manière dont ils sont prononcés. Le net permet aussi de couper la conversation à tout moment si on ne la supporte plus. Terminé les personnes coincées dans des discussions qui les désintéressent complètement ou qui les énervent sans qu'elles puissent se fâcher. Entre les phrases, on peut marquer des pauses plus ou moins longues sans que l'autre sache si on réfléchit ou si on fait autre chose. D'ailleurs le net a aussi ça de formidable qu'on peut y discuter avec plusieurs personnes séparément et simultanément, chose parfaitement irréalisable à l'oral.
Autant d'exemples et de raisons qui font que je suis épanoui sur le net tandis que c'est l'inverse de vive voix. Je doute que le transfert de l'un à l'autre soit simple, peut-être même qu'il est impossible.

1/02/03
Mon psy a fait 9 petites croix sur une feuille, disposées sous forme d'un carré de 3 croix par 3. Le jeu consiste à passer par toutes les croix en 4 lignes droites sans lever le crayon. Ça traîne souvent dans les classes scientifiques, donc je connaissais la solution mais impossible de remettre la main dessus avec la présence du psy ! Il s'en va et je trouve la solution tout de suite, puis j'écris ça car évidemment le jeu avait un sens :
Avec une personne dans la pièce, en quelques secondes ça ne m'est pas revenu. A peine la personne sortie, le stylo traçait la solution. En présence d'une personne - et à fortiori en plein dialogue avec elle - je suis trop mal à l'aise pour réfléchir correctement, même à peine.

Il faut sortir du cadre imaginé par l'esprit pour trouver. Ce mini problème est encore plus efficace si on entoure les 9 croix par le tracé d'un carré.

Comment sort-on son propre esprit du cadre dans lequel il se croit limité ? En essayant d'élargir le champ des possibilités, de ne plus considérer que ce qui est acquis l'est. Je sais tout cela, et je l'ai déjà réalisé. Là j'en suis au point où après plusieurs tentatives infructueuses je me retrouve persuadé que l'élargissement n'est plus possible. Je sais, ça peut paraître prétentieux. Jusque là, je me suis efforcé d'être rationnel, maintenant je vais agir en optimiste. L'optimiste imagine que l'élargissement est encore possible. Imaginons comme lui. Cette hypothèse se heurte à 2 problèmes : - il faut que l'élargissement de la vision de l'esprit soit utile. Il existe en effet une multitude d'élargissements possibles qui ne servent à rien. - comment procède-t-on pour l'atteindre ? Si seule la réflexion le permet, et qu'on a déjà essayé plusieurs fois, comment fait-on ? Peut-on se faire aider ? Si oui, je ne demande que ça.

Il ne faut pas croire que je ne veuille pas améliorer ma situation, il ne faut surtout pas croire ça. Comme je l'ai déjà écrit dans plusieurs textes, je ne joue à aucun jeu, je ne cherche pas la contradiction, je ne fais pas de mon mieux pour me montrer pessimiste mais bien pour dégager ce qui est vrai. J'utilise les ressources qui sont à ma disposition pour trouver des solutions ou même des ébauches. Je n'y arrive pas. J'ai besoin d'aide, je ne suis pas sûr qu'elle me sera apportée, c'est comme quand quelqu'un qui est en train de se noyer appelle au secours : rien n'est sûr mais c'est la seule chance.

3/02/03
Nous avons mis le doigt sur une facette importance : les émotions. Avec le temps, je m'en suis coupé, de la plupart. Pour comprendre comment on peut se désactiver émotionnellement, effectuons une comparaison. Prenons le cas d'un petit enfant, souffrant de strabisme (les 2 yeux ne voient pas la même image). Le cerveau ne pouvant se servir de deux images qui ne se superposent pas, il va avec le temps n'en retenir qu'une seule, celle d'un des deux yeux. L'autre oeil verra toujours mais l'information ne sera plus utilisée par le cerveau. C'est une sorte de désactivation psychique, produite de façon naturelle. Ça s'est un peu passé comme ça pour moi au niveau des émotions, petit à petit, mon cerveau ne voyant pas l'intérêt des informations émotionnelles, il a cessé de les traiter, pour la plupart.
Il se trouve que dans le cas du petit enfant, une rééducation du traitement de l'information de son "mauvais oeil" est possible, en procédant petit à petit. Il y a des chances qu'une rééducation du traitement des informations émotionnelles soit possible aussi.
Cependant, il existe une difficulté bien plus délicate que cette "rééducation", il s'agit de savoir si je la souhaite ou non.
Pourquoi ne le voudrais-je pas ? Ce n'est pas évident à expliquer. Déjà, quand j'étais plus jeune, je ressentais des émotions mais avec le temps, je n'en ai plus voulu. Ce n'était ni une crise anti-émotions, ni un hasard, je considérais les émotions comme bêtes, sans intérêt, je les ai logiquement délaissées. Je suppose que pour moi, les émotions sont une facette de l'être humain que je trouve nuisible. Elles sont source de souffrance - que je trouve nuisibles - et aussi de plaisir, mais un plaisir non intellectuel, raison pour laquelle je le rejette.
Le fait que les gens ressentent des émotions est l'une des raisons qui font que je supporte mal d'être en groupe, voire même en présence d'une personne. Voilà un peu concernant la problématique de me faire accepter un retour à l'émotivité. Voyons maintenant la situation si je le refuse.

Intelligence et émotions constituent assurément deux caractéristiques majeures de l'être humain. C'est notamment ce qui rend la vie difficile. Cependant, grossièrement, que l'on se cantonne à l'intelligence et l'on tend vers la machine, et que l'on se cantonne aux émotions et l'on tend vers l'animal. Il apparaît très délicat de vivre une vie d'être humain si on tend trop vers l'un de ces deux extrêmes. Depuis quelques années, on peut dire que petit à petit, je me suis rapproché d'un être qui n'était plus fait que d'intelligence, inhibant en moi le reste, notamment les émotions. Il s'avère que c'est une existence difficile, sans quoi je n'en serais pas à déprimer à ce point depuis tant de temps.

En analysant la situation, nous tombons - comme souvent - sur un paradoxe. En me construisant de la manière qui me semblait convenir le mieux, au fil des années, je me retrouve dans une situation où je souffre, de part mes déprimes conséquences de mon mal être, de mon dégoût de la vie. A la suite d'une réflexion, une solution s'est détachée, envisageable, mais celle-ci va précisément contre mes goûts, mes convictions et mes réflexions. Si ce n'était qu'un mauvais moment à passer, si par exemple la rééducation émotionnelle durait un certain temps, durant lequel je souffrirais, puis qu'ensuite j'aille tout à fait mieux voire bien, ça serait génial, je n'hésiterais pas du tout à me lancer dans cette voie, sur cette piste. Cependant la réalité est autre. C'est tout ce que j'ai construit en moi qu'il faut abandonner, changer ma perception, mes convictions, toutes mes réflexions, toute ma vision des choses, tout. J'insiste sur le fait qu'on ne se construit pas par hasard mais selon ce qui nous convient le mieux, nous plaît le plus, nous semble le plus légitime, le plus réfléchi, le plus adapté pour nous même.

Non seulement c'est une tâche difficile mais en plus je n'en ai aucune envie. Sincèrement si je devais la réaliser je préférerais mourir.

7/02/03
Le lendemain de ma dernière écriture ici, nous avons commencé à débattre brièvement sur l'utilité comparée de l'intelligence et des émotions. J'ai écrit ce texte sur mon point de vue à ce propos :
(...)
Je ne l'ai plus sous la main mais en gros ça explique que l'intelligence a permis aux premiers hommes de survivre, que sans elle l'avancée du progrès serait nulle, qu'elle permet d'apprendre de ses erreurs, de résoudre des problèmes, d'anticiper, de planifier, d'improviser, bref d'innombrables choses. A côté de ça je demandais l'utilité d'être triste, celle d'être angoissé, à quoi ça sert d'être joyeux, d'être amoureux, l'utilité de ressentir de la honte...etc. Sans trouver de réponse, à part à montrer aux animaux et aux extraterrestres que nous sommes des êtres humains.
(...)
et en ai fait part à mon psychiatre. Le lendemain, il m'a apporté un livre, "L'erreur de Descartes" de Damasio, sous-titré "la raison des émotions". J'ai eu 3 jours pour le lire et faire le résumer des 300 pages. Venant de le finir, je ne peux avoir tout de suite une vision claire dessus, cependant je retiens déjà que les émotions sont indispensables pour gérer nos relations sociales, et qu'elles sont très liées - contrairement à la vision cartésienne, la plus courante - aux processus de raisonnements. Le corps et le cerveau (et par extension l'esprit) ne sont pas dissociés mais au contraire liés, et les émotions influent sur les raisonnements, notamment en bien et surtout au niveau social.
Ça m'amène à revoir ce que j'ai dit la dernière fois. Je n'affirmerais plus que je suis désactivé émotionnellement, ce qui est plus proche de la réalité à mon avis, c'est que les situations et contextes dans lesquels je me trouve n'ont pas pour effet de me faire ressentir des émotions. C'est difficile à expliquer comme sujet. Je dirais que les éléments pouvant engendrer des sensations émotionnelles n'ont pas le même effet sur tout le monde. Une chose peut faire rire une personne et pas une autre, une chose peut attrister une personne mais pas une autre...etc. Ce qui se passe avec moi, c'est que la plupart des choses, éléments ou situations qui font ressentir des émotions à la plupart des autres personnes ne me font pas d'effet, voire un effet inverse comme le dégoût - enfin c'est plus le fait de voir tout le monde réagir et moi pas qui engendre la sensation de dégoût -. Il s'avère que nous n'avons pas la même "échelle inconsciente de déclencheurs émotionnels". Cette échelle comprendrait tout un tas de choses susceptibles de nous faire réagir émotionnellement. Quand dans un groupe, les échelles de plusieurs personnes se recoupent, l'apparition (ou le déclenchement) d'une chose appartenant à l'échelle aura pour conséquence le ressentiment de la même émotion chez ces personnes.
Je pense que mon échelle est peut-être plus petite que celles des autres et en tout cas qu'elle contient peu d'éléments présents aussi chez les autres.

L'analyse continue, bien que parfois entrecoupée de moments difficiles, mais c'est normal. L'objectif principal, qui est la recherche de solutions ou d'alternatives (à la mort), ne peut s'effectuer qu'avec une analyse (la meilleure possible) de la situation.

12/02/03
Je rectifie, certes on poursuit l'analyse, un peu, mais je commence à douter qu'on dégage des idées de solution, même des ébauches. Bien sûr les psychiatres se montrent optimistes, toujours à dire qu'ils y croient, qu'ils ne se font pas de soucis. Mais si on regarde ma réalité, on voit 4 mois à 1 séance par semaine pour rien, suivi de plus de 2 semaines à une par jour pour pas grand chose. Simples constats.
Hier, j'entendais à la radio qu'un sondage sur les employeurs a montré qu'ils embauchent plus les "beaux" que les "moches", et à la question "comment fait-on si on est moche ?" ils répondent "en riant". C'est-à-dire qu'une personne joyeuse a un atout majeur par rapport à une personne qui ne l'est pas. Le milieu professionnel n'est qu'un exemple, en fait c'est vraiment au niveau social en général que le rire est important. Prenons une personne qui raconte quelque chose qui se veut drôle, si vous riez vous gagnez sa sympathie alors que la tendance est inverse si vous ne riez pas. C'est un critère majeur pour tisser des relations sociales, encore plus depuis les années 80-90 vu le contexte difficile politique et social.
J'avais d'ailleurs commencé à évoquer le rire dans mon livre, me rendant déjà compte de son importance. Une personne qui ne se marre pas est comme handicapée par rapport aux autres. La plus ou moins grande aptitude d'une personne à rire teinte sa vie positivement ou négativement.
Autre point capital à mon sens, l'aptitude (au sens de "tendance à", de "fréquence") à la communication orale. Peu importe qu'on dise n'importe quoi, tant qu'on parle. Je crois que c'est là quelque chose qui a beaucoup de poids au niveau social. Evidemment ça paraît débile, mais je ne suis plus étonné dé découvrir des critères débiles intervenant dans les relations entre personnes. La plupart des personnes fréquentant des personnes qui ne disent "rien" en viennent rapidement à s'ennuyer de leur présence. Dans un groupe, les personnes qui parlent le plus sont les plus estimées par les membres du groupe et inversement pour ceux qui parlent le moins. Selon ma logique, ça devrait être la qualité des interventions (voire leur moindre fréquence) plus que leur nombre qui influe directement sur l'estime qu'ont les gens les uns envers les autres.

Reprenons. Au niveau social, des critères majeurs de considération sont l'apparence, l'aptitude à rire et l'aptitude à la communication orale.

Un mot pour dire qu'à propos de l'apparence, comme expliqué dans mon livre, il y a 2 points : le physique inné et le look (tout ce sur quoi on peut influer). Ce que je trouve incroyable concernant les 3 critères que j'ai cités (qui influent fortement sur la considération sociale que les gens ont pour une personne), c'est à la fois qu'ils me paraissent ahurissants et que ce soit si réel. J'avoue être effaré devant la stupidité (ça n'est que ma perception) de la réalité, une nouvelle fois.

J'aimerais maintenant m'intéresser à l'importance ou non du développement personnel sur ces critères, c'est-à-dire si c'est inné ou si ça s'acquiert (ou se délaisse) pendant qu'on se construit, ou les deux.

Concernant l'apparence c'est très clair, la partie dont on n'est pas responsable (exemple : la forme du visage, la couleur de peau, la taille...etc) est innée tandis que l'autre partie que j'appelle parfois look est quelque chose qui s’acquiert au cours de notre développement personnel. Selon l'environnement dans lequel on a grandi et évolué et notre vision des choses, on va être amenés à apporter un soin tout particulier à son look (vêtements, coiffure, pour les femmes bijoux, maquillage...etc) ou à ne lui accorder qu'une importance minime. Que ce soit l'une ou l'autre facette de l'apparence, je trouve que ça n'a pas de sens qu'une part de la considération sociale se base là-dessus. Je sais, on n'a pas le choix, c'est comme ça, il n'empêche que je trouve ça insensé et effarant.
Voyons maintenant ce qu'il en est des aptitudes à rire et à la communication orale, je crois qu'on peut les rapprocher sur ce thème. Je dirais que pour une petite partie, c'est inné et que pour la majeure partie, ça ne l'est pas; On peut imaginer qu'un enfant de 2 parents qui rient peu aura tendance à rire peu, phénomène qui sera amplifié au cours de son éducation s'il vit avec ses parents (le plus probable). Pour savoir si ça peut être inné, même à peine, il faudrait bien sûr faire de nombreux tests en plaçant des bébés différents au niveau de leurs parents sur le plan du rire dans des milieux d'éducation différents, bref des tests très difficiles à réaliser, on le comprendra aisément. Mon hypothèse de toute façon est que la part innée de notre aptitude à rire est petite. Donc, ça s'acquiert tout au long du développement personnel, selon les environnements dans lesquels on évolue et selon notre perception des choses. Il est certain que c'est un phénomène très complexe, dépendant de nombreux facteurs.
On peut faire le lien avec le fait que l'aptitude à rire soit un critères social majeur. Est-ce notre faute si on est moins susceptible à rire que les autres ? Ça revient à demander si on est entièrement responsable de son développement personnel. J'en doute fort ! C'est quelque chose qui fait intervenir tellement de facteurs qu'on ne peut pas en être complètement responsable. Cependant, on a sans doute une part de responsabilité dans notre aptitude à rire.
On ne peut pas être blâmé pour la part dont on n'est pas responsable, mais peut-on l'être pour celle dont on l'est ? C'est une grande question à mon avis. Peut-on être blâmé pour la vision qu'on a des choses ? Dans un monde idée non, dans un monde idéal chacun accepte la vision des choses qu'a chacun bien qu'elle soit différente et ce tant qu'elle ne devient pas réellement gênante pour les autres. Dans un monde idéal, toute vision qui ne nuit pas à autrui est acceptée et respectée. Notre monde est autre, dans notre monde certaines personnes n'acceptent pas la vision de certaines autres (plus ou moins inconsciemment), bien qu'elles ne nuisent à personne. Je peux même citer le mot tolérance, bien que je ne sois pas sûr que ça corresponde exactement ici. On en vient à évoquer la notion d'égoïsme. Si vous aimez les gens qui rient (c'est la même chose avec ceux qui parlent beaucoup), vous allez naturellement les apprécier tandis que vous allez avoir moins de considération pour ceux qui ne rient pas. Ce "moins de considération" peut prendre de nombreuses formes différentes, d'autant plus marquées et fortes que l'égoïsme de la personne est grand. Si ce "moins de considération" reste raisonnable, peut-on blâmer la personne d'être égoïste ? Je ne le crois pas, il est naturel qu'elle ait plus d'estime pour les personnes qui agissent comme elle aime que pour les autres. Attention, je ne suis pas en train de dire que les critères "rire" ou "communication orale" sont respectables mais bien que c'est le comportement à base égoïste des personnes qui ont des affinités pour certaines choses qui est compréhensible. Ça n'empêche pas que ça me gêne que les critères sociaux majeurs soient ceux que j'ai cités !

J'ai fait l'étude pour l'aptitude à rire, et c'est en fait pratiquement la même chose pour celle à communiquer oralement. Une petite partie est innée mais la majeure partie s'acquiert au cours du développement personnel. Quelque part on n'y est pour rien et quelque part c'est notre vision des choses. Toujours est-il que l'apparence, l'aptitude à rire et l'aptitude à la communication orale sont à la base des estimes ou manques d'estime au niveau interpersonnel.

On a des affinités pour certaines choses, des répulsions pour d'autres, si on ne les écoute jamais, on n'est plus rien. Concernant les critères majeurs cités, on peut faire une mini-échelle de "valeurs", allant de 0 à 2. On dira par exemple qu'une personne qui rigole tout le temps à 2 en rire, une "normale" 1 et une qui rit particulièrement peu souvent 0. Considérons les 4 domaines apparence innée, look, rire, communication orale. Il est à peu près clair qu'une personne "belle" aura une tendance naturelle à avoir une certaine répulsion pour les "moches", qu'une personne qui prend particulièrement soin de son look aura tendance à ne pas apprécier celles qui n'ont aucune considération pour leur look et inversement, même chose au niveau du rire et de la parole. La tendance naturelle est que les 0 et 2 ne s'aiment pas beaucoup, et par opposition les 0 et 0 ainsi que 2 et 2 s'apprécient assez. Evidemment on peut reprocher plein de choses à ma schématisation, notamment un manque de nuances mais je cherche à simplifier étant donné la complexité du domaine. On peut bien sûr s'amuser à faire des échelles de 1 à 10 ou de 1 à 100.
Pour l'instant, considérons ce schéma 0-1-2 qui permet déjà de faire des analyses.
On ne peut pas vraiment en vouloir aux 0 qui n'aiment pas beaucoup les 2 et inversement. Ce qui se passe dans la réalité c'est que les personnes jugent rarement sur un seul critère, la considération que l'on a pour une personne dépend des "notes" dans différents domaines, y compris certains autres que les 4 cités, chacun étant plus ou moins important selon les personnes. Pöur continuer à schématiser (toujours pour mieux gérer la complexité des éléments étudiés), on peut imaginer qu'inconsciemment chacun attribue une note globale d'affinités à chaque personne. Prenons un exemple concret.
Personne Apparence Look Rire Comm.o.
 A        0       1    2     1
 B        1       2    1     0
Soit la personne A, considérée par l'ensemble de ses semblables comme plutôt moche, accordant une importance normale (moyenne) à son look, ayant une tendance assez forte à rire et une communication orale plutôt normale.
Soit la personne B, d'apparence relativement banale mais prenant très soin de son look, ayant une tendance à rire moyenne et étant assez timide.
A propos de la note d'affinités, on peut imaginer différents modes de calcul. Simplement, avec cette échelle 0-1-2, disons qu'un écart de 2 fait un malus, qu'un même chiffre fait un bonus (sachant que 0-0 et 2-2 rapportent plus que 1-1), pour un écart de 1 il faut juger. Au niveau de la note que chacun va affecter à l'autre, il est essentiel de comprendre qu'elle va dépendre de l'importance que la personne donne aux différents domaines. Pour A et B, vu qu'il n'y a aucun écart ni de 2 ni de 0, on peut penser que l'entente sera moyenne. Si par exemple B trouve que le "look" est particulièrement important, il va "reprocher" à A de n'y avoir que 1. Si A considère l'aptitude à rire spécialement importante, ça ne sera pas génial pour B de n'y avoir qu'1 pour leur entente.
Bien sûr, il est plus fréquent de voir des personnes qui ont 2 dans une "catégorie" la considérer importante. Mais de temps en temps, on peut voir des personnes à 1 voire à 0 qui ont de l'estime pour ceux qui ont 2 dans la catégorie. Effectivement, c'est loin d'être si simple que "les 0 n'aiment pas les 2".
Comme dit plus haut, le nombre de catégories peut être élevé et surtout les relations interpersonnelles dépendent de l'importance que chacun accorde à chacun d'elle.
Revenons à mon cas. Pour les 4 critères je me considérerais 1-0-0-0. Bien sûr il faudrait une échelle élargie pour mieux refléter la réalité, par exemple 1-10 : 4-2-1-1.
On ne peut pas me mettre beaucoup plus que 1 ou 2 dans les 2 dernières catégories, sachant qu'une personne à 0 tend vers l'autisme. Si on faisait des statistiques poussées sur un échantillon de personnes (ce qui n'est pas évident car il est parfois difficile de juger ses propres aptitudes), on pourrait voir que leurs notes d'affinités avec moi seraient négatives pour la plupart. L'inverse est vrai aussi.


L'être humain a une tendance naturelle à être attiré par le beau et les personnes belles. Une étude a été faite par des chercheurs sur des bébés. Des images de visages, de tous types de beauté leur étaient présentés. Ils ont remarqué que les bébés étaient attirés par les visages beaux ! Ils se tournaient vers eux pour les examiner, les contempler, délaissant les autres. La tendance à apprécier les personnes belles est donc quelque chose d'inné. Je pense que cette caractéristique peut s'estomper (ou s'accentuer) avec le temps, que l'environnement et le développement personnel peuvent la faire varier, cependant il est clair que c'est la grande tendance, et pour cause, elle est innée.
Quand on demande à une personne l'importance qu'elle accorde à l'apparence physique, beaucoup ont tendance à répondre "aucune", pourtant inconsciemment elle est réelle.

Au niveau du look, la tendance à s'en préoccuper n'a je crois jamais été aussi marquée qu'actuellement. Pubs pour vêtements, chaussures, produits de beautés, gels, rasoirs, savons, parfums...etc n'ont jamais occupé une place aussi considérable. Et l'importance qui y est accordée suit derrière. Si la note était entre 1 et 10, nul doute que la majorité des personnes auraient entre 5 et 10, tout en y accordant une importance non négligeable.
Les aptitudes à rire et à parler sont tout aussi importantes de nos jours et les notes dans ces domaines doivent là aussi être assez hautes. Ce n'est pas par hasard que je considère ces critères comme majeurs au niveau social.

Pour en revenir sur moi et finir, il se trouve que j'ai des notes très faibles dans des domaines où la tendance est à des notes élevées et qui sont considérés comme les plus importants (que ce soit plus ou moins conscient). Les personnes qui soignent particulièrement leur look m'irritent un peu, plus encore quand elles considèrent cela comme très important chez les autres, de même que les personnes qui rigolent souvent et celles qui parlent beaucoup. Déjà que c'est difficile comme situation mais naturellement l'inverse est vrai aussi : les personnes qui m'irritent puisqu'elles font des choses que je n'aime pas, je les irrite aussi car je ne fais pas les choses qu'elles aiment. (on remarque que l'antipathie des 0 pour les 2 est plus grande que celle des 2 pour les 0 de part le fait que les uns reprochent une activité aux autres tandis que les autres reprochent une passivité).
Voici ma répulsion pour les gens en partie expliquée ainsi que, même si c'est dans une moindre mesure, leur répulsion pour moi.

Quand je passe plus de 3 heures sur une analyse comme ça, ça me fait plaisir.

Différences sur Internet

Le rôle de l'apparence et du look diffère complètement. Au niveau de la rencontre d'une personne déjà, ces 2 éléments sont inexistants. Ensuite, si on a rencontré la personne physiquement, on a son apparence à l'esprit mais elle n'est pas sous nos yeux à sans cesse nous la rappeler. Quant au look c'est pareil, on peut se rappeler de celui de la personne quand on l'a vue mais pas plus. Le net permet de converser tout en ayant n'importe quel look sans que ça influence les échanges.

Et au niveau du rire et de la communication, ça change aussi. Comme j'en parlais l'autre fois, le fait que la communication ne soit plus orale transforme les conversations. Tout passe par les mots qui eux mêmes sont tapés par les doigts. Le rire, comme les autres émotions, est dit, parfois accompagné d'un sourire facial. Ça peut sembler bizarre mais le net change tout, la différence est grande.
Les raisons de rire changent ainsi que la façon dont on le fait. La façon de communiquer change ainsi que les contenus des conversations. Le phénomène est tellement complexe qu'il faudrait au moins lire les travaux d'une thèse sur le sujet pour le comprendre plus en détails.

Sur le net j'arrive à supporter les conversations que j'ai (qui sont pour 99% d'entre elles bilatérales (2 personnes)), j'en ai même besoin; à l'oral je les supporte difficilement et je m'en passerai même volontiers.

3 composantes

Une personne, c'est 3 facettes : l'apparence, l'intelligence et le comportement. Comment dire...
Sur Internet, seule l'intelligence et la personnalité sont "actives". Si on transmet une photo, on obtient à peu près une 2eme facette de la personne. Mais si vous mettez d'un côté l'intelligence et de l'autre l'enveloppe corporelle, vous n'obtenez pas un être humain. Il faut une 3eme facette, obtenue en faisant le lien entre les 2 autres, ce qui fait que le cerveau peut déplacer le corps, ce qui crée les comportements.
Le corps est un outil social : apparence, look, paroles, rires...etc. On se sert de son corps et de ses comportements pour tisser des relations sociales. Sur Internet la notion de comportement disparait. Chacun conserve son corps, ce qui lui permet de ressentir des émotions, mais les relations entre les personnes ne dépendent plus de comment on utilise son corps. Elles dépendent de 2 choses : le sens de ce que l'ont dit et les émotions que l'on transmet.

J'ai réussi à préciser ce qui me répugne : l'utilisation de son corps pour tisser des relations sociales. Ce que j'apprécie sur Internet, c'est que les relations sont tissées par ce qu'on pense (et dit(=écrit)) et non par la manière de se comporter.

La plupart des comportements n'ont qu'un faible lien avec la réflexion, c'est bien sûr l'inverse pour les pensées. Attention, je ne suis pas en train de contredire Damasio, les émotions peuvent aider à la réflexion mais un comportement n'est pas une émotion. Certes, une émotion peut être traduite par un comportement, par exemple un rire, mais ce comportement n'aidera en rien la réflexion. Et c'est à sens unique : aucun de nos propres comportements ne peut engendrer qu'on ressente une émotion. Le fait que ce soit le cerveau qui engendre les comportements (quoi d'autre ?) ne signifie pas qu'ils ont été le fruit d'une réflexion.

Résumons mon point de vue : réflexion oui, émotions oui (et les 2 sont liés) mais comportements non fruits d'une réflexion (la plupart donc) non.

La différence avec le net a été un peu expliquée et ça a permis de mieux définir les raisons de ma différence d'appréciation entre relations face à face et relations via le net.

13/02/03
Quand on se rend compte que notre réalité (chacun a la sienne) est trop différente de celles des autres pour tisser avec eux des relations viables et durables, une question apparaît naturellement : peut-on changer ? Une autre question l'accompagne évidemment : le veut-on ? Et c'est seulement si on répond oui à cette dernière qu'on peut envisager la première. J'ai déjà essayé de changer de moi-même, sans succès, et en fait au bout d'un moment je me suis rendu compte que je ne le souhaitais pas. J'en ai parlé quand j'évoquais ma désactivation émotionnelle (qui était comme on l'a vu un faux point de vue), je suis content de la manière dont je me suis construit. Il se trouve que je suis malheureux comme ça mais ça n'est pas de ma faute, c'est le monde dans lequel on vit qui fait ça. bien sûr, il paraît idiot de se construire puis de se rendre compte que cette construction n'est pas adaptée au monde au lieu de d'abord regarder le monde puis de se construire d'une manière adaptée mais il faut bien comprendre que c'est le monde qui m'a construit autant que moi-même. Je ne comprends pas pourquoi les gens pensent que si on est malheureux à cause de notre perception de la réalité c'est que forcément quelque chose a cloché dans notre développement personnel. Ça ne leur viendrait pas à l'esprit que de façon tantôt réfléchie, tantôt naturelle, la nature combinée à la nature de l'être humain fait qu'une personne se construise puis qu'elle soit malheureuse, alors que rien n'a cloché. Si la nature ne produit pas des merveilles, on pense que ce n'est pas elle seule qui est intervenue. Absurde.
Je suis né être humain normal puis j'ai évolué dans un environnement classique, banal, normalement. La simple combinaison de mes éléments biologiques et psychiques avec mon environnement social a donné ce résultat. Tout s'est passé naturellement, oui la nature peut engendrer des situations affreuses, oui. Et je ne veux pas aller contre la nature, contre ma nature. Que se passe-t-il quand on ne veut pas changer sa réalité (d'ailleurs l'eusse-t-on voulu, c'eut été une tâche des plus ardues, mais c'est un autre débat) ? On a 2 choix : assumer ou pas. Assumer c'est vivre. Ne pas assumer s'appelle le suicide.

C'était pas vraiment la peine de venir dans une clinique ni de s'entretenir avec des psychiatres pour tomber sur une conclusion qu'on possédait déjà avant. Enfin si ce n'est de dissiper les rêves des rêveurs qui croyaient qu'il y avait pour vous une autre possibilité que de vivre malheureux ou de mourir.

Ceux qui n'ont toujours rien compris, et ils sont nombreux, doivent se demander pourquoi je tiens à ne pas changer. Je ne crois pas que je pourrai trouver une métaphore suffisamment adaptée. Imaginez seulement que pour moi changer signifie être encore plus malheureux que je ne le suis déjà. Je suis content d'être comme je suis et ça s'est produit de façon naturelle. J'apprécie ma vision des choses. Je conçois que ça puisse sembler ridicule, bête et prétentieux, pourtant ça n'est rien de tout cela et seules les personnes qui ont été dans le même cas que moi peuvent le comprendre.

Le développement personnel est quelque chose qui se produit à partir de la psychologie de la personne et de son environnement et ce de la façon la plus naturelle qui soit (en admettant qu'il n'est pas troublé par quelque événement particulièrement perturbant). Comment définit-on si une personne s'est trompée au cours de son développement personnel ? Il y a certaines choses pour lesquelles on peut dire si oui ou non elle s'est trompée mais pour d'autres on ne peut rien dire. Par exemple, entre 15 et 16 ans, une personne va entendre à de nombreuses reprises de part ses fréquentations que - par exemple - les juifs sont des idiots. Si rien ne vient contredire cela, la personne va arriver à 20 ans et croire cela. On pourra dire dans ce genre de cas qu'elle s'est trompée dans son développement personnel, peu importe que ça soit sa faute ou pas, car il est démontré depuis longtemps qu'aucune couleur de peau, tradition d'une communauté ou religion définissait l'intelligence.
Pour des éléments de ce genre, il va de soi qu'on peut dire qu'untel s'est trompé ou pas dans son développement personnel mais ce dernier comprend bien d'autres choses pour lesquelles on ne peut rien dire car c'est subjectif. "J'aime les personnes joyeuses", "j'aime le foot", "je crois que l'humanité court à sa perte", "ceux qui croient en Dieu ont tort" ...etc. Sur des points comme ceux là, chacun a son propre avis, ça fait partie de la vision des choses, de notre réalité propre. Les personnes peuvent toujours débattre sur certains points mais personne ne peut dire que "sur tel point telle personne se trompe", on peut simplement dire "sur ce point je ne suis pas d'accord" et ensuite nuancer l'estime que l'on a pour la personne en fonction de l'importance que l'on accorde au sujet.

Les points sur lesquels ma réalité diffère de celles des autres sont de ce dernier domaine, subjectifs. Personne ne peut dire que je me trompe, simplement qu'ils ont une vision différente de la mienne.
Toutes les réalités sont différentes, en deçà d'un certain "seuil de différence" on peut vivre avec des personnes, accepter (tolérer) leurs visions et être très heureux comme ça, mais si le seuil est dépassé, la différence des réalités entraîne que l'entente est trop difficile, trop fragile. C'est précisément ce qui se passe entre les autres et moi.

Au niveau des points subjectifs de ma réalité, j'ai la confirmation chaque jour que c'est vraiment ce que je pense, même quand j'essaye de porter un regard neuf sur les choses. Bref je me rends compte que la vision que j'ai est celle qui me correspond le mieux. Et donc, comme je l'ai dit, je ne veux pas la changer, bien que ça puisse paraître peu compréhensible pour une personne extérieure (et ce bien que j'ai fait de gros efforts pour expliquer). Il me reste à choisir : assumer ou non. Le choix est difficile, choisis-bien.

J'ai quand même le choix à la base entre 1) changer ma réalité et 2) vie malheureuse ou mort, ne pensez-vous pas que si je choisis 2 c'est que j'ai des raisons et notamment une profonde aversion fondée pour 1 ? Je connais ma réalité et en gros celle des autres et je sais que toute évolution qui tendra à rapprocher la mienne des autres me déplaira, pas parce que je veux être différent à tout prix, mais parce que j'aime ma réalité et pas celle des autres.

14/02/03
A partir du moment où je choisis de ne pas changer, pour les raisons expliquées avant, je n'ai plus rien à faire à la clinique. C'est la dernière fois que j'y écris, occasion de faire le point sur la situation.
Je choisis de vivre, bien qu'il y a toutes les chances que je sois malheureux. Peut-être que des changements dans ma perception se réaliseront d'eux-même, rendant ma vie moins difficile ou peut-être que non et que le chemin est effectivement invivable. Si je retombe au fond du gouffre (quand en suis-je sorti d'ailleurs ?), enfin si je ne supporte plus de vivre à un moment, j'aurais alors le choix entre un retour ici dans le but de changer mais je ne veux pas de ce changement et ne le crois pas possible, et la mort. C'est limite un retour à zéro, si ce n'est que maintenant je sais qu'il est inutile de consulter des psychiatres dans la situation dans laquelle je suis, avec ce que je pense.
Si j'avais choisi d'essayer de changer, la piste principale aurait été la communication orale, mais je sais que mon appréciation de celle-ci ne changera pas et que la communication orale ne sera jamais la communication par Internet, comme je l'ai évoqué avant.
Que ce soit avec un psy ou avec l'autre, à chaque fois c'est moi qui ai fait la grosse partie de l'analyse et eux n'ont pas de solution, juste une hypothèse chacun, que je considère comme fausses. L'un veut me faire partir au bout du monde, ne comprenant pas que c'est avec la nature humaine que j'ai un problème et que tous les gens du monde sont des êtres humains. L'autre croit que les conversations orales peuvent un jour m'intéresser ou faire autre chose que me dégoûter. Bon, ils n'ont pas compris, je ne leur en veux pas, très peu de personnes me comprennent.
Simplement, il n'y a pas de solution actuellement, c'est tout.
Je vais essayer de vivre, ça n'est déjà pas si mal, même si ça n'est pas grâce à eux.
L'analyse est bouclée, peut-être y aura-t-il d'autres analyses à l'avenir, peut-être seront-elles différentes, mais en ce qui me concerne maintenant, il n'y a plus rien à analyser.