15.7.19

Nouvelles

 Bonjour D.,

Je ne résiste plus si bien. Aucun partage. Aucune perspective.

Je pense avoir identifié que j'utilise inconsciemment les échecs et le scrabble comme supports à ma confiance en soi. Et ça ne marche pas. Mais je n'ai rien d'autre.
Quand je joue à peu près correctement, je trouve ça normal. Quand je joue mal, je ressens de profondes blessures et je m'attaque.
Cela le fait même avec des parties amicales de quelques minutes sur internet.

Je suis dans une recherche permanente de contrôle total. C'est sans doute une des raisons qui font que j'évite de sortir de chez moi et d'interagir avec des gens.
Que je ne supporte pas les jeux faisant intervenir le hasard.
Et que je ne supporte pas le fonctionnement humain. Ses besoins d'être aimé, ses besoins primaires, sociaux, permanents. Sa dépendance au corps.

Je repense à Fanny Nusbaum qui me suggérait les électrochocs (à moins que ce ne fut moi qui lui suggérait et elle aura dit que c'était une possibilité). Quand une neuropsychologue réputée en vient à cette extrémité, n'est-elle pas vraiment désespérée ? Ou alors est-ce vraiment quelque chose qui peut donner des résultats ? Y a-t-il des risques d'effets secondaires ? Je ne m'en souviens plus.

J'ai très peu de souvenirs positifs de ma vie. Ils ne se fixent pas dans ma mémoire car je suppose qu'ils ont besoin d'émotions positives pour se fixer.
J'ai un certain nombre de souvenirs négatifs, mais il pourrait y en avoir beaucoup plus car j'ai sans doute mis en place des stratagèmes pour les vivre moins intensément et donc moins les fixer.

Je dois gérer beaucoup de choses du quotidien cette semaine, avant mon départ pour les championnats du monde. Cette gestion me stresse, comme d'habitude.
J'ai beaucoup de mal à l'appréhender. Je dois aller dans des magasins. Prendre rendez-vous chez le coiffeur. Faire mes comptes trimestriels pour les déclarer à l'urssaf et à la caf qui me les réclame depuis plus d'un mois.
Je ne sais pas comment je vais aller aux championnats et cela me stresse d'être potentiellement isolé sur place. Typiquement avec qui manger.
C'est peut-être aussi un peu pour ça que j'avais arrêté les compétitions.
En plus d'être durement affecté quand les résultats ne sont pas là.

Je remarquais qu'il y avait 730 repas par an, et je ne sais pas comment je résiste depuis si longtemps avec une absence d'entrain à manger.
Je remarquais que j'aurai 40 ans dans 4 ans et ça m'a attristé.
L'une de mes plus grandes sources de tristesse est d'être structurellement dépressif. Je croyais longtemps qu'en travaillant dessus quelques années, ça pourrait disparaître ou s'estomper suffisamment. Comprendre que cela m'affectera toute ma vie est une source infinie de tristesse.

S.